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Alexis Sukrieh
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Alexis Sukrieh

Une vallée, un salon du livre, des pensées vagabondes

Posted on 19 février 202021 février 2020

J’ai participé au Salon du livre de Nantua samedi 15 février 2020, en compagnie de mes charmants éditeurs de L’Astre Bleu : Eliane et Henri Protto.

L’expérience de la dédicace était nouvelle pour moi, aussi ai-je écouté avec attention les conseils avisés d’Henri. Assurément, rester une journée assis à saluer les passants, sourire et se tenir prêt à expliquer la substantifique moelle d’un texte n’est pas tâche aisée. Non, ce n’est pas simple, mais ô combien stimulant.

Entre deux signatures, je me laissais bercer par mes pensées vagabondes et songeais au chemin parcouru par ce texte.

Eliane et Henri Protto, des éditions L'Astre Bleu
Eliane et Henri Protto, des éditions L’Astre Bleu

D’abord journal des dernières vingt-quatre heures de mon père — qui constituent la pire des journées que j’ai vécues — le texte a ensuite subi nombre de transformations.

Le journal s’est trouvé remodelé, puis enrichi de scènes imaginées de la vie de mon père, alors étudiant étranger arrivant à Caen. Ensuite, après quelques lectures complices, une nouvelle mouture du texte, plus directe, moins lourde, plus concise a pris forme.

Vint le moment des différents envois aux maisons d’édition, et l’entretien téléphonique avec Henri Protto qui a suivi, la longue et gratifiante conversation que nous avons eue, puis la signature du contrat, les corrections avec Éliane, nombreuses, ciselées et rigoureuses, et le fameux tirage. Je me revois le livre en main, rêvassant un moment devant la couverture dessinée par mon frère Yvan, à partir d’une photo de notre père.

Quelques semaines plus tard, la candidature au Prix Littéraire de Caen, son jury, présidé par Claudette Caux — que j’ai eu la chance de rencontrer autour d’un café dans le restaurant de la bibliothèque Alexis De Toqueville à Caen – qui m’informa quelques mois plus tard au téléphone que j’étais présélectionné.

Le temps file encore en avant, toujours trop vite, sans qu’on n’ait réellement l’occasion de se rendre bien compte des moments qui s’évanouissent derrière nous, et me voilà au bord d’un lac cerclé de montagnes, après avoir traversé des nappes brumeuses sur l’autoroute 404, j’y suis, je me gare sur le petit parking dans la vallée de Nantua, à deux pas de la médiathèque André Malraux.

Ce premier salon, cette table, ces exemplaires, ces lecteurs et lectrices qui s’arrêtent, prennent le livre en main, l’étudient, et me demande d’en parler. J’ai encore un peu de mal à y croire, mais tout ceci semble bien réel. Je dédicace un livre dont la couverture évoque les traits de mon père défunt. Allah ir’hamo, comme on dit en arabe. Qu’il repose en paix.

Alexis Sukrieh signature Nantua
Prêt à en découdre !

J’ai parfois l’impression de n’avoir été qu’un vecteur pour ce texte, que quelque chose de plus grand me dépasse et m’a habité le temps de l’écriture. Un appel impérieux telle une flammèche qui se serait embrasée dans mes tripes pour me forcer à cracher ce texte et a pousser l’effort jusqu’au bout, à ne jamais s’arrêter, ne jamais lacher prise, tant que l’objet final n’était pas terminé.

Je suis reparti du salon fatigué, mais gonflé d’ondes positives, galvanisé par l’idée que tout cela avait certainement un sens, quelque part, et que même si j’étais le jouet d’une inspiration insaisissable, c’était probablement parfait ainsi.

Une des femmes pour qui je dédicace un exemplaire dans l’après-midi semble très intéressée par le thème de L’apparition de l’oubli. Sans lâcher le livre qu’elle agrippe et serre contre elle, elle me demande d’en parler, l’œil brillant.

J’explique comme je le fais depuis mon arrivée matinale aux intéressé(e)s, que ce livre, quelque part, c’est le voyage initiatique intérieur d’un fils qui traverse le deuil de son père.

On ne fait pas un deuil, jamais, on le traverse. Cette origine syrienne, elle prend tout son sens pour le narrateur à la mort de son père. Quand il meurt, d’une certaine façon, il réveille son fils. Il le rend complet.

La femme me regarde. « Et vous n’avez rien écrit avant ça ? » Non, dis-je. « Et personne dans votre famille n’écrit ? » J’explique que non, pas à ma connaissance. Elle semble me sonder d’un regard de plus en plus intense.

« C’est votre histoire ? Celle du narrateur ? » J’explique que oui, que ce texte est construit comme un roman, avec deux lignes temporelles qui se croisent en sens inverse, mais que la matière brute, l’ossature des événements est réelle. Un roman d’inspiration biographique, dis-je.

Elle sourit. « Donc vous êtes d’origine syrienne. C’est pour ça, c’est votre origine méditerranéenne qui vous pousse à écrire, c’est dans l’ADN de cette région, de ces peuples. L’art de la narration, les histoires, les récits, le verbe. C’était votre destin », me dit-elle d’un ton implacable, telle une pythie venue à ma rencontre à des centaines de kilomètres de chez moi. 

Soudain, c’est mon regard qui s’illumine. « Vous ne croyez pas si bien dire, regardez, dis-je en ouvrant le livre à la première page, regardez la citation qui ouvre ce texte, c’est un proverbe arabe. »

El maktoub ma menno ma’roub. Nul n’échappe à ce qui est écrit, nul n’échappe à son destin.

Peut-être qu’après tout, ce livre était déjà écrit avant que je ne commence à formuler la première phrase du premier chapitre.

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